Note de Goéman : Jacqueline a visiblement quelques problèmes avec la technologie. On vient de recevoir à l’instant son dernier message, mais pas par mail, non, ce serait trop simple ! C’est donc un pigeon voyageur qui vient de m’amener le récit de ses dernières découvertes… Faut pas s’étonner si ça a mis du temps à venir. Promis le prochain coup, elle enverra un télégramme ^^
New Delhi – du 7 au 10 octobre 2010
L’arrivée
Nous avons décollé de Londres à 17h35 et nous sommes arrivées en Inde après 8h de vol à 6h20. Je n’ai rien compris au décalage horaire mais j’ai réglé ma montre comme il faut. C’est un peu comme un gros changement d’heure d’été où on règlerait le thermostat en même temps. Il fait à peu près 30°C ici. En arrivant, on pouvait apercevoir le soleil derrière une espèce de brume.
A la sortie de l’aéroport, quelqu’un de l’université nous attendait avec un panneau “Anne-Gaëlle” (et Jacqueline), très sympathique comme accueil ! Et découverte d’un nouvel environnement ! Ben elle est où la ceinture de sécurité ? Ah il n’y en pas, « Pas besoin, a dit le chauffeur, la voiture est protégée ». D’accord, mais elle inclut Jacqueline ton assurance ? Bon allez en voiture !
Oh mais il y a plein de toutous dans le coin ! Ah tiens… il y a des vaches qui se sont échappées d’un champs. A peine de le temps de découvrir ce nouvel environnement que nous voilà déjà arrivés à la Aravali International Guest House de la Jawaharlal Nehru University.
Nous partageons la chambre avec 2 lézards de compagnie : Anne-Gaëlle voulait leur donner des noms, moi c’était plutôt des coups de balai. Mais bon ils étaient là avant nous ! Repos et dîner à la guest house en compagnie d’un Népalais, d’un Russe et d’un Japonais. Nous avons mangé un thali : il s’agit d’un assortiment de plats : du riz, du pain (chapati) et 3 petites coupelles contenant une préparation épicée, une autre préparation très épicée et un yoghourt. Et avec cela, j’ai pris de l’eau, beaucoup d’eau. Anne-Gaëlle m’a dit « tu vois, ils sont branchés « algues » dans le pays ! » car « Thali » c’est aussi le nom qui est utilisé pour designer certaines algues en Bretagne, les grandes laminaires brunes.
Bon je suis un petit peu déphasée, la faute au décalage horaire paraît-il… Alors après le dîner, un spasfon et au lit !
Le premier Algonaute
Le lendemain matin, pas de temps à perdre, nous entrons dans le vif du sujet ! Et oui, même si je ne suis pas convaincue, je vais remplir ma mission et essayer de découvrir ce qui motive ces Algonautes !
Nous rencontrons le Dr. Sahoo : il dirige le laboratoire de biotechnologie marine d=au sein du département de botanique de l’université de Delhi. Le Dr Sahoo a déjà écrit plusieurs livres sur les algues. Voilà donc à quoi ressemble un Algonaute ! Eh bien à première vue, rien ne laisse supposer cette particularité. Dinabandhu Sahoo est très enthousiaste et également très convaincu par les potentialités des algues. Avec son équipe, il travaille à la fois sur les macroalgues et les microalgues et sur plusieurs thématiques : la culture des macroalgues, les biocarburants avec des microalgues, la séquestration du gaz carbonique par des algues…
Alors pour tout vous dire je recopie mes notes mais je ne comprends pas du tout ce que cela veut dire. Anne-Gaëlle dit que nous aurons l’occasion d’en reparler au cours du voyage. Je dis oui, mon cerveau ne s’est pas encore mis à l’heure locale!
Alors j’ai commencé par lui poser des questions de base et celle qui m’intrigue le plus : pourquoi travailler sur les algues ? Selon moi, ce ne sont pas des végétaux très intéressants et il faut être un peu tordu pour se passionner pour des choses gluantes…
Le Dr Sahoo m’a dit que les algues jouent un rôle très important sur Terre… Moi qui pensais que le rôle principal des algues était de faire fuir les touristes. Il m’a expliqué que, comme tous les végétaux, les algues réalisent la photosynthèse. A cet instant, j’ai refait une visite virtuelle de l’hôpital et je me demandai bien dans quel service on pouvait avoir une photosynthèse… Mais avant que je n’aie le temps de poser la question, le Dr. Sahoo a précisé que pour se nourrir, les végétaux utilisent du gaz carbonique et rejettent de l’oxygène. Le gaz carbonique c’est le fameux dioxyde de carbone CO2 dont on entend parler dans la réclame pour les voitures. Et l’oxygène, c’est celui-là même dont nous avons besoin pour respirer (pour être précis c’est du dioxygène O2). La photosynthèse n’est donc pas un examen médical mais un phénomène biologique qui se produit chez les végétaux. Anne-Gaëlle m’a proposé d’en reparler lors d’un prochain vol. Je dis oui, je tiens à bien gérer mon énergie. Eh bien, lors de cette discussion à Delhi, j’ai appris que plus de la moitié de l’oxygène de l’atmosphère de notre planète est produit par les algues (microalgues et macroalgues) ! C’est énorme !
Le Dr Sahoo m’a également dit qu’il y a 3,8 milliards d’années, les premiers végétaux qui sont apparus et ont réalisé cette fameuse photosynthèse étaient des algues : elles étaient les seules à savoir faire cela et en ont profité pour proliférer et occuper le terrain… pendant 2 milliards d’années ! Avec tout ça, elles ont transformé leur environnement car en piégeant le dioxyde de carbone et en rejetant du dioxygène, elles ont permis l’établissement de l’atmosphère et de la couche d’ozone sur la planète. Bon… je veux bien faire un effort pour faire croire que je les crois mais je reste dubitative… je me demande bien qui sont les témoins de l’époque !
Le Dr. Sahoo a ajouté aussi que les algues sont là la base de la chaîne alimentaire. Comme les algues fabriquent leur propre nourriture grâce à cette fameuse photosynthèse, elles n’ont pas besoin de manger d’autres organismes. Par contre elles constituent de la nourriture pour des animaux. Les microalgues vont être mangées par des animaux microscopiques. Tout ce petit monde microscopique constitue le plancton qui est en suspension dans la masse d’eau : le phytoplancton c’est la partie végétale et le zooplancton c’est la partie animale.
Mais ce n’est pas fini, le zooplancton qui a mangé le phytoplancton (vous suivez ?) sert ensuite de nourriture pour des animaux plus gros qui seront eux-mêmes mangés par plus gros qu’eux. Et les macroalgues aussi sont à la base de chaine alimentaires car elles vont être « broutées » par d’autres animaux.
Mais alors… ça voudrait dire que les sardines et les maquereaux que je mettais en conserves à l’usine, c’est parce qu’il y avait des algues qu’on avait pu les pêcher… ça alors, quand je vais dire ça à Ernestine !
Eh bien pour une première rencontre, voilà déjà beaucoup d’éléments ! Et en rentrant, je me suis rendue compte que j’avais encore plus de questions ! S’il faut des algues pour avoir du poisson, comment se fait il qu’il y a de moins en moins de poisson ? Alors qu’en plus, il y a de plus en plus d’algues vertes !
Finalement, il me tarde de voir ce que me dira le prochain Algonaute.
Bon entre temps, je vous assure que nous n’avons rien demandé mais nous nous sommes retrouvées dans une autre chambre et dans celle-là, « y’a pas de lézard ! ». Je sais à présent d’où vient cette expression.
Les impressions
Pendant qu’Anne-Gaëlle profite de ces quelques jours à Delhi pour organiser son séjour en Inde avec l’aide du Dr Sahoo, je me familiarise avec ce nouvel environnement.
Qu’est ce qu’il est joli ce campus, on se croirait à la campagne ! Et il y a des écureuils dans tous les coins ! Il y a beaucoup de toutous aussi mais ce ne sont pas des toutous à grattouilles. Ils sont plutôt du genre indépendant et ils n’ont pas l’air de remarquer notre présence.
Il y a un petit marché à l’entrée du campus : c’est bien différent du marché hebdomadaire de chez nous, mais j’aime tout autant y aller, je goûte plein de choses sans savoir ce que c’est, c’est un peu l’aventure ! Bon je garde la bouteille d’eau à portée de main les épices transmettent à l’intérieur la chaleur de l’extérieur!
Nous avons pu découvrir la ville aussi. Lors d’une sortie de nuit à Delhi, nous avons vu le palais présidentiel, les ministères, et… l’Arc de Triomphe ? Anne-Gaëlle m’a fait de gros yeux. Pff, comme si elle savait ce que c’était ! Après renseignement, ce beau monument est l’India Gate, la porte de l’Inde. Il a été construit entre 1921 et 1931 pour commémorer les soldats indiens morts lors de la première Guerre Mondiale et lors des guerres afghanes.
Parfois pour nous déplacer, nous hélons un autorickshaw. Des autorickshaws nous n’en avons pas en France : il s’agit d’une sorte de tricycle motorisé couvert reconnaissable aussi à leur vert et jaune. Et il y a un truc que j’ai bien compris : le chauffeur triple le prix normal lorsque nous sommes toutes seules sans ami indien. Taquin, va ! Ça tombe bien, j’aime bien jouer, Anne-Gaëlle me laisse gérer et en général, 2-3 clins d’œil plus tard, le chauffeur redevient raisonnable avec Tata Jacqueline ! Pour conclure sur l’autorickshaw, j’aime bien le principe, c’est pratique, sympatique et facilement reconnaissable mais ça secoue les rhumatismes ! Ouillouillouille !
Ah ce que j’aime le plus, c’est l’élégance à tous les coins de rue. J’ai beau voyager avec ma plus belle jupe, je dois me rendre à l’évidence, je suis un laideron à côté de toutes ces femmes en sari. Toutes ces couleurs, ces bijoux et ces regards forts… Elles sont magnifiques !
En ce moment à Delhi ont lieu les Jeux du CommonWealth (je sais ce que c’est maintenant !). Nous n’avons pas assisté aux compétitions mais nous avons pu les suivre dans plein d’endroits : il y a toujours une télé allumée ! D’autant plus que l’Inde est seconde pour le moment, juste derrière l’Australie ! C’est un événement spécial, tout est très sécurisé et de grands panneaux colorés décorent la ville. Mais en passant en voiture, j’ai cru voir des enfants derrière…
Sinon je vois toujours les vaches mais je ne vois jamais les champs… Nous partons demain pour l’Ouest du pays, la région du Gujarat, mais nous serons de retour à Delhi à la fin du séjour.
Cap à l’Ouest ! Direction la région du Gujarat – du 11 au 14 octobre 2010
Voilà, c’est parti pour notre premier déplacement en Inde. Nous voyageons par train de nuit. C’est Anne-Gaëlle qui a pris cette décision et honnêtement je ne suis pas très emballée. Je sens que je ne vais pas fermer l’œil de la nuit et que je vais être cassée de partout demain matin…
En attendant le départ
Nous avons rejoint la gare en prenant le métro, nous étions dans le compartiment spécial « ladies » ! A peine arrivées à la gare, dans la salle d’attente elle aussi réservée aux ladies, nous voilà encerclées d’une douzaine de fillettes qui reviennent d’un voyage scolaire. Elles nous touchent, nous disent que nous somme belles (ah le succès du long nez en Asie !), nous apprennent l’hindi, veulent échanger nos numéros de téléphone. Eh bien, ça fait plaisir ! L’une d’entre elles nous fait remplir son cahier de meilleures amies. Les questions vont du signe astrologique à « quel est ton chanteur préféré ? ». Malheureusement elle ne connaît pas Franck Michael. A la question « quelle est ta plus grande peur ? », je lui retourne la question. « Terroristes ». Sa réponse directe et en me regardant droit dans les yeux me cloue le bec. Douche froide pour Anne-Gaëlle. Moi aussi sur le moment, j’ai peur, peur de voir s’assombrir ces si jolis yeux.
Elles sont toutes très belles. Shubhangi veut être pilote, Balika sera médecin, Rajeshwari architecte. Quoi ? Le train est déjà là ? Je n’ai pas vu le temps passer en compagnie de mes nouvelles copines. Au revoir, Danisha, Laxmi, Seema et toutes les autres. Merci pour ce moment et plein de bonnes choses à vous.
La nuit du rail
Nous nous installons dans le train. Nous avons la couchette du haut. (Oui… Anne-Gaëlle se promène avec un personnage imaginaire (moi) mais ne va tout de même pas jusqu’à réserver deux billets de train). C’est Mira du Kazaksthan qui occupe la couchette du bas. Mira a un secret. Forcément. Sinon comment peut-elle faire 20 ans de moins que son âge, dégager autant de sérénité, être si intéressante, drôle et douce ? C’est une fée. Je ne vois pas d’autre explication. Elle me prête un de ses écouteurs pour écouter la musique de chez elle, je suis le mouvement de ses mains qui dansent gracieusement au rythme de la musique. Branchée sur le canal relaxation, je suis à présent sur répondeur, ne pas déranger. Au fait, que fais tu en Inde, Mira ? « C’est mon dixième séjour en Inde. Je viens passer un mois en stage. Je suis prof de yoga dans mon pays».
Mais Anne-Gaëlle, pourquoi tu n’as pas inclus le Kazakhstan dans l’itinéraire de la Route des Algonautes ? « Promis, le prochain tour du monde, on le fera sur les médecines douces ! » me répond elle avec un clin d’œil. Humm, massages, Tai chi, acupuncture, médecine chinoise… ce ne serait pas possible de changer le thème du voyage dès à présent et de faire la route des relaxonautes, une quête du bien-être ? Mais à dire vrai, maintenant que nous avons commencé à gratter le sujet, je commence à être de plus en plus intriguée par ces algues.
Et c’est en rêvant du Kazakhstan et de cette prochaine destination que je me suis endormie. Je me suis réveillée à 6h du matin lorsque le délicieux thé tchai a été servi. Juste avant que Mira ne descende du train. Au revoir Mira et merci pour ce moment. Rendez-vous sur Facebook ! C’est incroyable mais je me sens fraîche et pimpante, le train m’a bercée toute la nuit.
Plus que 4 heures de train et nous serons arrivées à Ahmedabad. Bon j’avoue que la perspective d’aller dans des endroits à peine listés par les guides touristiques ne me réjouit pas trop. Je ne suis pas sûre que ça impressionne beaucoup Ernestine et René tout ça. C’est vrai qu’on vient de commencer mais je trouve qu’on travaille beaucoup et qu’on ne fait pas beaucoup de tourisme.
- Tu sais, c’est souvent quand tu te retrouves dans des endroits moins touristiques que tu as les plus belles surprises ! » m’a dit Anne-Gaëlle.
- Bon ben j’espère qu’on verra au moins le Taj Mahal !
- On n’est pas là pour faire du tourisme Jacqueline ! Tu étais prévenue ! »
A l’arrivée à la gare d’Ahmedabad, nous avons été accueillies par un grand sourire et des brassées de gentillesse : Bujna, doctorante dans le laboratoire du Dr. CRK Reddy nous attendait. Plus que 3 heures de voiture et nous serons à Bhavnagar.
Flash-back
Arrivée dans l’après-midi, Anne-Gaëlle retrouve le Dr. Reddy. Ils s’étaient rencontrés en 2007 lors d’un congrès à Kobé au Japon. Quelques années plus tôt, CRK avait fait sa thèse dans le laboratoire du Pr Fujita à Nagasaki. Anne-Gaëlle se trouvait en stage dans ce même laboratoire à l’époque du congrès.
Mais là, « Pause » ! Il faut qu’on m’explique un truc… C’est quoi cette histoire de congrès ? Vous, les chercheurs, vous n’êtes pas plutôt censés faire des expériences dans des laboratoires et trouver des trucs ? Ne serait-ce pas une excuse pour faire des cafés-blablas avec les copains ces congrès ?
J’ai posé la question à Anne-Gaëlle. A son regard, j’ai senti que la réponse allait être soporifique. Elle n’a pas pu s’empêcher de revenir sur la démarche scientifique dans sa globalité : se poser une question, rechercher ce qui a été fait sur le sujet, émettre des hypothèses, élaborer et réaliser des expériences, analyser les résultats et communiquer. Pour ce dernier point, les chercheurs publient leurs résultats dans des revues, mais pas celles de la maison de la presse ! Ce sont des revues scientifiques où les articles sont rédigés en anglais. Il paraîtrait même que les chercheurs sont évalués en fonction du nombre de leurs publications et des revues dans lesquelles ils publient.
Les autres chercheurs peuvent ensuite s’appuyer sur les résultats publiés dans ces journaux pour mener leurs propres recherches (et ainsi ne pas ré-inventer l’eau chaude (en gros)). Eh bien pour faire bref, les congrès seraient aussi l’occasion de présenter les avancées des recherches, d’échanger et de nouer des contacts pour établir des collaborations internationales : tout cela permettrait d’avancer plus vite pour trouver des solutions à certains problèmes. Mais bon, en fait, je voulais juste savoir si les chercheurs vont au karaoké ensemble quand ils se retrouvent.
Enfin en tout cas, CRK Reddy et Anne-Gaëlle étaient très contents de se revoir et ils sont partis à toute vitesse dans le laboratoire pour regarder des fioles, des algues et des posters. Ah les posters… Voilà autre chose ! Quand j’entendais parler de posters, je me demandais si les chercheurs avaient besoin de décorer leur laboratoire avec les images de chevaux au galop ou de chanteurs célèbres pour être inspirés. Mais, ce n’est pas du tout le genre de poster que j’imaginais (même si certains ont des décorations très originales dans leur bureau). En fait, ils réalisent eux-mêmes leurs posters, avec une fibre artistique plus ou moins développée… et devinez quoi ? Ce sont des affiches qui synthétisent leurs résultats scientifiques et qu’ils présentent dans les congrès ! La communication !
Un nid d’Algonautes !
Nous ne restons pas longtemps à Bhavnagar et le lendemain de notre arrivée, c’est une journée intense qui s’annonce dans cette ville. Le centre de recherche que nous visitons s’appelle le CSMCRI, Central Salt & Marine Chemicals Research Institute et ses activités étaient à l’origine concentrées sur l’eau de mer et l’obtention d’un sel de qualité.
Anne-Gaëlle a couru toute la journée d’un Algonaute à l’autre. Elle a tout d’abord rencontré le Dr Pushipito Gosh, le directeur de l’Institut qui a très généreusement répondu à toutes nos questions.
Puis nous avons rencontré Dr Mody, Dr Mishra, Dr Kannan : microbiologistes, biologistes, chimistes, ils sont chercheurs à l’Institut. Et là je vais avoir du mal à vous raconter tout ce qui s’est dit : ça parlait de biocarburants, de bioremédiation, de culture d’algues, de noms bizarres, de pigments, de plastiques, d’algues vertes et j’en passe… J’ai eu du mal à suivre et pendant qu’ils discutaient entre passionautes, j’ai joué au jeu des sosies : j’ai croisé Bernard Tapie.
Ensuite, il a fallu se dépêcher car Anne-Gaëlle présentait son projet devant tout le monde. Alors je ne suis pas très calée en anglais mais j’étais obligée de sourire en entendant l’accent breton ! Et le petit côté dynamique, ça vient d’où ? Ah oui, elle n’a pas eu le temps de passer aux toilettes !
En tout cas qu’est ce qu’ils sont gentils ici ! Nous faisons le plein de sourires et nous avons même eu des cadeaux. Décidément ils sont forts pour me laisser sans voix dans ce pays…
Magie de Bhavnagar
Mais maintenant comment je vais faire… Comment je peux vous raconter ce que j’ai vécu ce soir-là à Bhavnagar ?
Ça a commencé fort avec cette célébration : des chants magnifiques interprétés par une communauté de personnes originaires du Bengale.
J’étais déjà séduite par le flot de sourires et de gentilles paroles, alors me mettre un joli poupon dans les bras, c’est se retrouver avec une Jacqueline toute fondue.
Ensuite, je n’ai pas compris où nous allions. Et nous voilà confiées à un couple d’étudiants, que j’appellerai respectivement « Prince » et « Princesse » par la suite. Rien à voir avec une pub pour le yaourt mais ce couple-là était aussi beau à l’intérieur qu’à l’extérieur.
Mon prince et ma princesse m’ont prise par la main et m’ont conduite dans une enceinte magique. Et là… comment décrire, les photos n’étaient pas permises dans cet endroit. Alors imaginez tous les impressionnistes réunis pour réaliser une toile immense. Ce qu’il me reste lorsque je ferme les yeux, ce sont les lumières, les visages ultra souriants, les vêtements aux couleurs chatoyantes, des danses aux rythmes incroyables, des mouvements gracieux, des pieds nus foulant ou effleurant la poussière, de l’effervescence. Ça explose, ça pétille, ça virevolte, ça vibre, et dans l’atmosphère du bonheur, de la joie, une incroyable légèreté et du partage.
« AG : Jacqueline, arrête, tes lecteurs vont croire que tu as pris une substance hallucinogène… Et c’est vraiment le genre de suspicion qu’on va éviter, si tu veux bien !»
Non, non, pas besoin de ça… Mes petits chatons, j’avais juste envie de partager avec vous une part de ce gâteau de bonheur multicolore.
Combien sont-ils ? 1000 ? 5000 ? 20000 ? Plus ou moins qu’aux Vieilles Charrues ? Dans l’allée centrale qui permet de contempler de part et d’autres les acteurs de ce spectacle incroyable, les regards se tournent vers nous. Combien sont-ils, les étrangers qui pénètrent dans cette enceinte vibrante ici à Bhavnagar ? Ma princesse me répond « Hmm… Aucun ». Exceptées nous.
Et nous sommes là, toutes deux médusées, émerveillées, contemplant et vibrant de cette transe avec eux. C’est la surenchère de sourire et d’énergie au rythme de la musique qui s’accélère.
Toutes ces manifestations célèbrent le festival Navratri. Ce festival célèbre la déesse Durga et sa victoire contre le démon Mahista. Durga est considérée comme la Mère Divine, elle possède le Shakti, le pouvoir féminin absolu et divers avatars. Navratri se déroule pendant 9 nuits et est célébré de différentes façons en Inde. Dans le Gujarat, cette danse sacrée, la Dandiya Raas, symbolise le combat entre Durga et Mahisha.
Un peu après, mon prince et ma princesse m’ont guidé dans une ronde et me voilà à mon tour envoutée ! Des rhumatismes, quels rhumatismes ? Envolés !
Et puis à minuit, mon prince et ma princesse nous ont ramenées dans la confortable guest house du CSMCRI. En nous retrouvant toutes les deux en tête à tête, nous essayons de réaliser ce qui vient de nous arriver.
Les dieux sont bien nombreux ici et je ne sais pas quelle divinité nous devons remercier mais c’était un privilège de vivre cela.
Nous partons le lendemain matin et nous sommes toutes les deux d’accord pour dire que le temps passé dans cet endroit était bien trop court. Je veux revenir à Bhavnagar !